L’entrepreneuriat hybride concerne les personnes qui créent leur entreprise tout en conservant leur travail salarié. Cela n’inclut donc pas les demandeurs d’emploi ni les étudiants-entrepreneurs.
Aujourd’hui, de nombreux salariés choisissent de cumuler différentes activités professionnelles ou d’exercer la même activité professionnelle sous plusieurs formes. Ces profils, que l’on qualifie aussi de « slashers*» ou «slasheurs», peuvent ainsi être à la fois salarié et entrepreneur. Les slashers sont des travailleurs qui ne se reconnaissent pas dans le choix d’une voie unique. Ils sont davantage généralistes et polyvalents que spécialistes d’un sujet.
Les chiffres publiés par l’INSEE en 2016 concernant l’année 2014 montraient déjà que 46% des personnes qui avaient créé leur autoentreprise avaient conservé une (ou plusieurs) activité(s) salariée(s).
En 2018, Près de cinq millions de personnes en France exercent plusieurs activités professionnelles simultanément. Cette tendance s’est accrue et concerne désormais plus de 15% de la population active. Elle peut s’expliquer par la précarisation du marché de l’emploi qui pousse les actifs à multiplier les sources de revenus mais aussi par une volonté de s’épanouir davantage dans sa vie professionnelle.
En effet, selon Alain Bosetti, co-fondateur du salon SME (Salon des Micro Entreprise): «L’activité principale des salariés ne correspond souvent pas à leur passion et ne mobilise pas toujours leur talent principal. Ils cherchent alors à développer une activité qui a davantage de sens pour eux et qui leur permet de tester une nouvelle idée entrepreneuriale, sans prendre de risques majeurs ».
Changer de métier au cours de sa vie n’est pas nouveau : des gens se réorientent professionnellement depuis la nuit des temps. Ce qui est nouveau, c’est la typologie de ces slashers puisque cette tendance touche les plus diplômé(e)s. Ceux qui avaient, jusque-là, un parcours professionnel plutôt normé, font exploser les codes de l’emploi : ils ont besoin de gagner de l’argent mais veulent s’épanouir dans leur vie professionnelle sans laisser pour compte leur vie personnelle. Et le slash leur permet de concilier ces différentes exigences.
En France, s’il est vrai que les chômeurs qui créent leur autoentreprise en font leur activité principale car ils n’ont pas d’autre choix, les salariés, quant à eux, qui créent leur autoentreprise, sont prêts à travailler énormément et recherchent généralement :
- La sécurité financière: les entrepreneurs hybrides conservent leur niveau de vie tout en lançant leur activité. Ils sont libres de décider quand ils pourront se consacrer à 100% (ou pas) à leur activité entrepreneuriale,
- Le moyen de tester leur idée sur le terrain et pas seulement par le biais d’une étude de marché,
- Le «luxe» de ne pas subir de pression temporelle pour le développement de l’activité entrepreneuriale (fin d’indemnités chômage, épuisement de la trésorerie prévue pour le lancement du projet, etc),
- La possibilité de revenir à leur statut initial en cas d’abandon de l’activité entrepreneuriale.
S’il permet, de manière générale, de limiter les risques et donc d’avoir une certaine sérénité au moment de créer son entreprise, l’entrepreneuriat hybride est également très exigeant. C’est une situation qu’il ne faut envisager qu’après mûre réflexion.
Les données sur l’entreprenariat hybride sont limitées car les enquêtes ont tendance à se focaliser sur l’activité principale et les données actuelles donnent une image mitigée de la qualité de ce type de travail. Une étude suédoise de 2013 montre que l’entreprenariat hybride est plus courant chez les jeunes et les séniors et que ces deux groupes ne sont pas motivés par des motifs économiques.
Des données provenant d’autres pays européens, notamment d’Allemagne et des Pays-Bas indiquent que les entrepreneurs hybrides exploitent généralement des entreprises à faible potentiel de croissance (Conen e.a 2016). D’autres recherches menées en Autriche suggèrent que les entrepreneurs hybrides génèrent en général un revenu supplémentaire pour compléter un revenu salarié à temps plein. (Bögenhold et Klinglmair, 2016).
L’entreprenariat hybride semble être un vecteur de succès pour le développement personnel mais beaucoup moins pour le développement économique de l’entreprise.
*«Slasher» est un terme émergent pour désigner les personnes engagées dans de multiples activités, dont un certain nombre sont rémunérées. On ne peut expliquer leur «métier» qu’en utilisant des « slashs » (exemple : formateur / développeur informatique / graphiste / DJ).
Sources
- creerentreprise.fr - Entrepreneur hybride : définition, avantages et inconvénients
- fondation-travailler-autrement.org - L’importance de prendre en compte l’entreprenariat « hybride »
- fondation-travailler-autrement.org - Un slasheur sachant slasher…
- fondation-travailler-autrement.org - L’Insee dresse le profil-type des auto-entrepreneurs
- openscience.fr - Hybridations salariat-entrepreneuriat et nouvelles pratiques de travail : des slashers à l'entrepreneuriat alterné
- myjob.company/fr/blog/slashers/ - Les slashers révolutionnent le rapport au travail